19/10/2008

Anxiety

Il y a des moments où je m'échappe à moi-même.
Pourtant, cela faisait longtemps que ça ne m'était pas arrivé. Depuis plusieurs mois je me sens moins douloureusement sensible, plus sereine, comme anesthésiée. Ce repos général me semblait inadmissible au début, mais aujourd'hui je me dis qu'il me rend la vie acceptable. Je ne me sens plus impuissante, j'ai l'intime conviction que je peux invoquer ma sensibilité si je le veux, quand je le veux. Je ne dis pas que je contrôle tout, ou que j'en ai seulement la prétention, mais je peux vivre sans être véritablement troublée.
Mais il y a quelques jours j'ai fait une crise d'angoisse en cours:

- accélération du rythme cardiaque
- picotements et brûlante chaleur au visage
- vertiges
- bouffées de chaleur
- douleur à rester immobile

Si j'en parle, on me dit soit que ce "n'est rien, tu sais bien, c'est toujours pareil en automne.", soit "tu vois, tu ne vas vraiment pas bien, tu devrais te secouer un peu", soit... rien. Ai-je vraiment à choisir entre une relativisation excessive et une dramatisation à l'extrême? Je déteste cette tendance familiale à faire comme si tout allait toujours bien dans le meilleur des mondes, ça me fait faire des rêves œdipiens glauques au possible. Mais je ne supporte pas non plus cette aggravation systématique de tout symptôme qui enfante de l'hypocondrie et mêle la fiction à la réalité à m'en laisser complètement délirante. En réalité, il n'y a sans doute rien à répondre à cela. Si j'en reste à ce vertige auquel je peux prêter d'autres explications que le malaise psychique (la fatigue, le cycle menstruel, le rhume, le travail et sa relative rétribution), je ne chercherai sans doute pas à me faire du mal par des chimères, qui se sont souvent avérées encore plus douloureuses que la réalité. Mais si ça recommence, si ça s'aggrave, il me faudra peut-être sérieusement considérer l'idée d'aller voir quelqu'un, dans ce cas, il faudra que ça vienne de moi.
Je me sens vraiment saine d'un point de vue intellectuel. Cependant, ce serait bien sûr de l'idiotie de considérer que je peux être infaillible, forte sans limite.
Il y a aussi ces rêves "érotiques" qui n'ont absolument rien de sensuel, mais dégorgent un sentiment de raté, d'insatisfaction, d'ennui.
Ce qui m'inquiète un peu en fait c'est l'ennui que j'éprouve à l'idée de revoir ma vie sentimentale - et ma vie relationnelle en général - mon absence de désir réel malgré un certain manque affectif. Je veux plaire à un moment, et ça me fatigue et me lasse le moment suivant. Les gens me frustrent ou me comprennent trop. Je n'arrive plus à retrouver le délice que j'éprouvais dans l'altérité.

Peut-être que la littérature véritablement lue apporte une forme d'expérience. J'ai la sensation d'avoir des centaines d'années, je ne comprends pas pourquoi mes cheveux ne sont pas blancs et mes mains ne sont pas ridées. Je ne comprends pas mon corps. Je ne me vois pas. J'ai l'impression d'être devenue monstrueusement contradictoire.

10 commentaires:

Gavroche a dit…

Mais les contradictions ne sont-elles jamais charmantes ? Pour ma part, je n'utiliserai jamais l'adverbe "monstrueusement" aux côtés de "contradictoire" et de tous ses dérivés. Enfin... il faut croire que c'est une question de point de vue.

InSan a dit…

"charmantes" et "monstrueuses" ne me semblent pas si éloignés que ça d'un point de vue intellectuel (enfin, étymologique), si c'est celui que tu évoques.
Mais bon, ici il s'agissait surtout de quelque chose de psychologique. C'est assez effrayant de vivre dans la tension et l'angoisse.
Je ne philosophais pas sur le concept de contradiction si c'est ce que tu veux dire.

Gavroche a dit…

Je ne m'autoriserais jamais à penser cela :) Non, j'ai des bases en psychologie et en philosophie, mais ce ne sont pas - et de loin - mes domaines de prédilection. Ceci dit, vivre dans l'angoisse est, en effet, effrayant, mais pour ma part, je pense que c'est dans ces moments là (ce qui suppose que l'angoisse soit temporaire) que l'esprit est le plus fort.

InSan a dit…

Oui, je vois ce que tu veux dire. Ça peut être l'impulsion nécessaire à la création. Le coté positif du spleen, tout ça :p je suis d'accord, j'ai toujours trouvé ça fascinant.
Mais vivre dans l'angoisse en permanence, ce n'est pas possible. C'est vraiment insupportable. Enfin, ce n'est pas (plus) mon cas, alors, je suppose qu'il n'y a pas de mal à être un peu contradictoire :)
Je devrais arrêter de me prendre la tête avec ça.

Anonyme a dit…

Se prendre la tête dans ses mains, la regarder un peu, faire la moue, se sentir étrangère à soi-même, et trop familière - avoir envie de changer d'air et d'âme et puis... remettre sa tête sur ses épaules, hausser les épaules, et continuer à vivre... Je n'ai pas tellement de solutions mais je comprends très bien. Quant à la nécessité de la "cure", je n'en sais rien non plus, je n'arrête pas d'osciller entre le oui et le non. Tout est, sûrement, un question de "supportable". Tant que ça reste "supportable"...

InSan a dit…

"Malheureux peut-être l'homme, mais heureux l'artiste que le désir déchire".
Merci Elise - même si tu n'en sais rien, et même si je n'en sais rien; même si nous n'avons aucune solution. Tu fais partie de ces personnes qui apportent du "supportable".

Anonyme a dit…

Merci à toi ! :) (Et puis merci pour cette citation, je ne connaissais pas - ou je ne me rappelais pas - ce poème de Baudelaire, qui est très beau.)

Anonyme a dit…

Ce que je viens de lire me rappelle ce que je me dis parfois pour me rendre les heures qui passent supportables : "Les choses sont ce qu'elles sont, à nous de trouver le moyen de les rendre supportables"... Notre appréciations des choses, leur donne un sens.

Par ailleurs j'ai l'impression de trouver du Baudelaire dans ce tu écris. Une certaine aspiration vers le calme et la sérénité "L'idéal", puis vient l'angoisse "Le spleen". C'est une dualité très humaine. A mon sens, il me semble vain de vouloir trouver dans les dires d'autrui un sens quelconque à ce notre ego peut vivre... Mais il est bien évident qu'il faut trouver le moyen d'apprécier justement les avis des autres. Car malgré notre solitude face à nous même, nous vivons avec les autres.

InSan a dit…

Oui, il est fort possible que je me sois laissée influencer par Baudelaire - maître.
Je ne sais pas si les dires d'autrui peuvent apporter une quelconque vérité. Plus on en parle, moins je sais ce qu'est la vérité. Mais ça donne matière à penser, non?
Merci d'être repassé par là ;)

Anonyme a dit…

Si cela donne matière à penser... ??? Peut-être. Cela dépend de comment tu peux le percevoir je crois.

Je passe souvent. Quand cela m'inspire, je me plais à croire que ce que je peux mettre comme commentaire peut être intéressant... Ah l'égo...

;)
Je repasserai