02/12/2008

La fête I

La brume éclaire la nuit d'un scintillement glacé d'hiver; elle s'élève en volutes timorées au-dessus d'un grand chapiteau aux couleurs obscènes : bleu, orange, rouge, vert, mauve. Des couleurs qui crient, des couleurs qui rient, des couleurs qui prient, qui demandent l'absolution, qui se repentent des spectacles dont elles ont été témoins. Elles sont la césure agressive du dedans et du dehors. Dehors : la pluie, le froid, le calme. Dedans : la chaleur, le plaisir, l'ignominie. Le silence libre du repos bercé par l'éclat diaphane de la lune - le silence contraint de la douleur observée par des milliers d'yeux violés.
Des danseuses font des pointes, elles s'accordent en se transperçant, elles sont la souplesse rigide de la beauté automate - quelque chose qui n'existe pas. Des éléphants miment les mouvements des demoiselles, forment des arabesques gigantesques, arborent leurs trompes massives aux allures de serpents; leur regard est dur, leur peau est rugueuse, ils sont une masse invisible. Des trapézistes, des fakirs, des magiciens, des foulards, rubans et falbalas, des bâtons de feu, des couteaux, des chevaux, des juments, des hyènes, des lions effrayés, des autruches, des panthères, des ours, des vautours, des serpents, des boucs, des chèvres, des bœufs, des baleines, des licornes, des singes, des zèbres, des chimères, des harpies, des minotaures, des centaures, des sirènes, des satyres.
Le clown est assis dans un coin, il ne voit pas la funambule le regarder en sanglotant. Son maquillage coule; las, il fait tourner la manette d'un orgue de barbarie.


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